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Salle à manger, vers 1929, Illustration tirée de Travaux d’architecture de Ch. Bourgeois, Coll. C.H.L.

Au début du 20ème siècle, la pièce centrale de l’habitation bourgeoise reste la salle à manger. C’est une véritable salle d’apparat où s’exhibent les objets décoratifs : lustres, vaisselle, argenteries et boiseries. Elle participe au décorum du repas qui est un moment privilégié dans les relations familiales mais aussi sociales : c’est là que les affaires se traitent, que les mariages se font.

Plan de la maison de Mme Flipo au Mont d’Halluin, 1931, Encre sur papier de Ch. Bourgeois, Coll. C.H.L.

L’organisation de cette maison de campagne est adaptée aux besoins d’une famille nombreuse et aisée. La salle à manger est ouverte sur le living-room qui fait office de salon de réception mais aussi de lieu dédié à la vie familiale. Les enfants possèdent leur propre espace, une salle à manger et une salle de jeux qui communique directement avec l’office et la cuisine, le domaine des domestiques.

Scène d’intérieur, 1ère moitié du 20ème siècle, Huile sur bois de G. Dervaux, Coll .C.H.L.

Dans un logement modeste, une jeune femme absorbée dans sa lecture s’apprête à boire un café, chauffé dans un marabout. Le mobilier, le fourneau, les ustensiles et la table décorée d’une nappe, évoquent une cuisine aux multiples fonctions : salle à manger et pièce à vivre.

Cuisine d’un pavillon Jean Prouvé, Les Orions à Tourcoing, Vers 1952, Photographie, Coll. Vilogia.

Cette cuisine-salle à manger, dotée de rideaux en guise de cloison, est un exemple d’aménagement de logements petits mais confortables construits après la Seconde Guerre Mondiale. En 1952, Jean Prouvé conçoit et aménage ce pavillon à Tourcoing pour répondre à la commande politique qui souhaite lutter contre la pénurie de logement et l’habitat insalubre.

À table !
La salle à manger
La salle à manger occupe une place centrale dans l’habitation. Son organisation dépend du statut social et de l’évolution des modes de vie. Deux modèles vont cohabiter, un espace spécialisé à la prise du repas et un espace plus polyvalent.

Un espace spécialisé

Jusqu’au 17ème siècle, il n’y a pas de lieu spécifique destiné au repas. La table est mobile, constituée de tréteaux et de plateaux que l’on dresse au gré des besoins. Les premières salles à manger font leur apparition dans les maisons nobles et bourgeoises du 18ème siècle.

Décrivant une maison de notable du 18ème siècle à Tourcoing, T. Daussy écrit :

« Au centre de la pièce trônait une longue table en chêne recouverte d’une fine nappe et d’un chemin de table (…) ».


A cette époque, attribuer un espace à la prise du repas devient une exigence des classes aisées. La salle à manger est le lieu de réception et de sociabilité. La famille s’y restaure et reçoit là ses invités dans un décor richement apprêté. Ainsi, la salle à manger est consacrée à la vie familiale et sociale, alors que la cuisine est réservée aux domestiques.

La salle à manger représente un symbole de réussite et finit par être adoptée par les classes moyennes de la fin du 19ème siècle. Avec l’évolution des modes de vie et la diminution de la taille des logements, elle a tendance à se transformer au profit d’une salle mixte, voire polyvalente. C’est le living-room ou la cuisine ouverte sur la salle à manger, qui expose l’intimité des coulisses familiales aux visiteurs.

Un espace polyvalent

Que se soit pour des raisons matérielles ou d’adaptation aux nouveaux modes de vie, la salle à manger devient un lieu multiforme qui réunit plusieurs fonctions domestiques.

Au 19ème siècle, le schéma traditionnel de l’habitat paysan et de l’ouvrier urbain est organisé autour d’une pièce polyvalente où l’on travaille, cuisine, mange et se lave. Aussi, compte tenu de l’exigüité des logements et du manque d’équipement, peu d’ouvriers mangent dans leur logis, se nourrissant à l’extérieur, dans les rues ou les cafés.

La pièce « à tout faire » d’origine rurale, décriée au départ dans les villes pour son incommodité, inspire finalement les concepteurs de logements ouvriers. Au tournant du 20ème siècle, elle est adoptée sous le nom de « salle commune » car elle permettrait de favoriser la cohésion familiale dans les milieux modestes.

Progressivement, le modèle de la salle polyvalente se diffuse dans toutes les classes sociales. Les pièces auront tendance à fusionner pour ne former qu’un seul espace de vie, tout à la fois cuisine, salle à manger, salon et même bureau aujourd’hui.