Si des cantines d’entreprises ont existé en France dès la première moitié du 19ème siècle, elles ne se généralisent qu’au siècle suivant dans les usines du Nord.
Les objectifs du patronat répondent à différents enjeux : contrôler la main d’œuvre pour réduire l’alcoolisme et la fréquentation des cabarets et régénérer la force de travail des salariés en leur offrant une nourriture relativement abondante à un coût compétitif.
On imagine combien l’assurance de repas chauds et copieux a pu être un élément de confort dans des existences précaires. Dans le roman de Maxence Van der Meersch, l’auteur décrit un repas au réfectoire de l’usine offert à des salariés non grévistes.
« On allait manger dans un réfectoire le dîner qu’offrait l’usine. Naturellement, de ce bénéfice, tout le monde se hâtait de profiter. Personne ne retournait chez soi. On avait là du bon manger, un rata de soldats, copieux, avec une grosse tranche de jambon. Chacun redemandait du rata, deux et trois fois, par économie, pour n’avoir plus faim, tout le reste de la journée. »
Quand les sirènes se taisent, 1933.Le réfectoire est aussi le lieu de la convivialité partagée, favorisée par l’entreprise. Les motivations de la direction sont facilement perceptibles : souder les employés de bureau et les ouvriers et créer le partage autour des valeurs et des objectifs de l’entreprise.
Les cantines scolaires
En 1882, les lois de Jules Ferry créent l’école laïque et obligatoire mais n’obligent pas les communes à ouvrir des cantines. L’organisation est empirique et laissée à l’appréciation des instituteurs et des communes.
A Tourcoing, grâce à l’action de Gustave Dron, fervent défenseur de l’école publique, les cantines scolaires sont créées en 1893. Tout enfant peut, contre un jeton, payant ou gratuit selon les revenus de la famille, manger à la cantine. La commune veille à la professionnalisation du personnel, à la propreté des locaux et au respect des bonnes pratiques d’hygiène.
Au temps de Gustave Dron, l’idée de proposer des repas collectifs à l’école n’est pas partagée par tous. Les cantines habitueraient les parents à ne pas assumer leurs devoirs envers leurs enfants. C’est seulement en 1936, sous le Front populaire, que la présence d’un réfectoire dans chaque école est rendue obligatoire.
Les menus des repas servis à la cantine font l’objet de constantes préoccupations car ils touchent à la santé de l’enfant. L’aspect quantitatif est d’abord privilégié dans l’objectif de lutter contre la dénutrition. Depuis les années 1980, la cantine s’est vue confier un rôle central dans la promotion de l’équilibre alimentaire, l’éducation au goût et au plaisir.